La dame que je suivais, développant sa taille élancée dans un mouvement qui faisait miroiter les plis de sa robe en taffetas changeant, entoura gracieusement de son bras nu une longue tige de rose trémière, puis elle se mit à grandir sous un clair rayon de lumière, de telle sorte que peu à peu le jardin prenait sa forme, et les parterres et les arbres devenaient les rosaces et les festons de ses vêtements ; tandis que sa figure et ses bras imprimaient leurs contours aux nuages pourprés du ciel. Je la perdais ainsi de vue à mesure qu’elle se transfigurait, car elle semblait s’évanouir dans sa propre grandeur. « Oh ! ne fuis pas ! m’écriai-je… car la nature meurt avec toi! »
***
Gérard de Nerval, Aurélia ou le rêve et la vie, 1855, extrait
Tableau de Botticelli, Primavera, 1477, détail : l’enlèvement de Flore.
3 commentaires
Comments feed for this article
2 mai 2010 à 10:14
Epitaphe Voili-voilou et oupala
Comme c’est magnifiquement décrit. Cela me rappelle un écrit auquel je tiens particulièrement: « Le Nénuphar ». Je ne me savais pas si proche de Gérard de Nerval. Ma foi, associé au tableau de Botticelli « Primavera, 1477, détail : l’enlèvement de Flore » cela me renvoie à un essai nommé « Chloris » ou « Le Chien d’Hermlin ». Ces 2 nouvelles de1545 mots valent le détour d’un coup de pédalier dans les collines de la Valle Del Diabolo où Zéphir nous entraine sur les traces de Chloris et d’Hermlin.
2 mai 2010 à 14:08
Ad
Et oui, Gégé est proche de tout le monde ! son vrai nom n’est d’ailleurs pas « de Nerval » mais « Labrunie »…
J’aime beaucoup le rêve décrit dans ce texte, l’image de la femme qui grandit et dont la robe devient la nature est merveilleuse, et m’évoque la robe de Flore dans ce tableau de Botticelli. A l’époque où j’ai écrit la nouvelle dont tu parles, j’étais à fond dans Nerval, et tout ça m’avait pas mal inspiré…
C’est vrai qu’il y a le même mvmt de grandissement dans ton Nénuphar, mais du coup, ce serait un peu la même scène, vue du point de vue de l’intérieur de la femme qui grandit. Le Nénuphar rappelle aussi celui qui pousse dans le poumon de Chloé dans l’Ecume des jours.
2 mai 2010 à 18:55
Epitaphe Voili-voilou et oupala
Et oui, je suis faite et refaite en ce qui concerne « Le Nénuphar ». Je pro-prose »Le Nez du Phare »sachant que cet hiver j’ai eu les sinus quelque peu pris. Ouaf
Cela dit, j’aime beaucoup tes rapprochements extérieur-intérieur comme représentation symbolique de l’homme et de la femme.
Il me plairait qu’un jour tu présentes tes nouvelles et autres créations artistiques dans un blog.
A bientôt de découvrir d’autres poèmes