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comme une aile noire j’ai déployé ma chevelure
sur tes genoux.

Fermant les yeux tu as humé son odeur,
et tu m’as demandé alors :

« Dors tu sur des pierres couvertes de mousse ?
Attaches tu tes tresses avec des branches de saules?
Ton coussin est il fait de trèfle ? Ta chevelure est elle si noire
parce que tu y as ecrasé un épais et sombre jus de baies sauvages ?
Quel parfum étrange et frais t’entoures !
Tu sens les ruisselets, la terre, les forêts.
Quel parfum utilises tu ? » Et en riant je t’ai dit :

« Aucun, aucun, aucun !
Je t’aime et je suis jeune, je sens le printemps.
Cette odeur que tu sens est celle d’une chair ferme,
de joues claires et du sang neuf.
Je te veux et je suis jeune, voilà pourquoi j’ai
les mêmes parfums que le printemps !  »

***

Traduction de Racbouni

Salammbô, princesse de Carthage, se livre à un hymne à Tanit, déesse de la Lune entre autres…

Mais elle releva la tête pour contempler la lune, et, mêlant à ses paroles des fragments d’hymne, elle murmura :
– « Que tu tournes légèrement, soutenue par l’éther impalpable ! Il se polit autour de toi, et c’est le mouvement de ton agitation qui distribue les vents et les rosées fécondes. Selon que tu croîs et décrois, s’allongent ou se rapetissent les yeux des chats et les taches des panthères. Les épouses hurlent ton nom dans la douleur des enfantements ! Tu gonfles le coquillage ! Tu fais bouillonner les vins ! Tu putréfies les cadavres ! Tu formes les perles au fond de la mer ! »
– « Et tous les germes, ô Déesse ! fermentent dans les obscures profondeurs de ton humidité. »
– « Quand tu parais, il s’épand une quiétude sur la terre ; les fleurs se forment, les flots s’apaisent, les hommes fatigués s’étendent la poitrine vers toi, et le monde avec ses océans et ses montagnes, comme en un miroir, se regarde dans ta figure. Tu es blanche, douce, lumineuse, immaculée, auxiliatrice, purifiante, sereine. »
Le croissant de la lune était alors sur la montagne des Eaux-Chaudes, dans l’échancrure de ses deux sommets, de l’autre côté du golfe. Il y avait en dessous une petite étoile et tout autour un cercle pâle. Salammbô reprit :
– « Mais tu es terrible, maîtresse ! … C’est par toi que se produisent les monstres, les fantômes effrayants, les songes menteurs ; tes yeux dévorent les pierres des édifices, et les singes sont malades toutes les fois que tu rajeunis. »
– « Où donc vas-tu ? Pourquoi changer tes formes, perpétuellement ? Tantôt mince et recourbée, tu glisses dans les espaces comme une galère sans mâture, ou bien au milieu des étoiles tu ressembles à un pasteur qui garde son troupeau. Luisante et ronde, tu frôles la cime des monts comme la roue d’un char. »
– « O Tanit ! tu m’aimes, n’est-ce pas ? Je t’ai tant regardée ! Mais non ! tu cours dans ton azur, et moi je reste sur la terre immobile. »

***

 

Gustave FLAUBERT (1821-1880), Salammbô (1862), Chapitre III, Salammbô : Prière à Tanit

Tableau de Juan Miro, Lune Verte,

La bise fait le bruit d’un géant qui soupire ;
La fenêtre palpite et la porte respire;
Le vent d’hiver glapit sous les tuiles des toits;
Le feu fait à mon âtre une pâle dorure;
Le trou de ma serrure
Me souffle sur les doigts.

***

Victor Hugo, Dernière gerbe, 1902 (oeuvre posthume dont le titre n’est pas de Hugo ; le poème non plus n’a pas de titre)

J’aime à voir de beautés la branche déchargée,
À fouler le feuillage étendu par l’effort
D’automne, sans espoir leur couleur orangée
Me donne pour plaisir l’image de la mort.

 

 

Ce beau poème m’a été donné en commentaire, et je le recopie ici pour que tout le monde en profite.

Pareil à moi, tu passes
Les yeux rivés au sol,
Je les baissais – aussi,
Passant, arrête-toi!

Boutons-d’or et pavots à la main,
Tu liras sur la pierre
Qu’on m’appelait Marina
Et l’âge que j’avais.

Non, ce n’est pas une tombe,
Je ne surgirai pas, menaçante.
J’ai trop aimé moi-même
Rire quand il ne faut pas.

Le sang frappait à mes tempes
Et mes boucles bouclaient;
Je fus aussi, passant!
Passant, arrête-toi!

Je n’accepte pas l’éternité
Pourquoi m’a-t-on ensevelie?
Je ne voulais pas quitter pour la terre –
Ma terre adorée.

Cueille une herbe sauvage
Et puis une fraise des bois –
Mûrie entre les tombes
Elle sera plus sucrée.

Mais ne te penche pas,
Triste, au-dessus de moi,
Évoque-moi sans peine,
Sans peine oublie-moi!

Comme le rayon t’éclaire
Il te poudroie d’or…
Que ma voix souterraine
Ne t’effarouche pas!

Koktebel, 3 mai 1913, in Le ciel brûle

Il brille, le sauvage Eté,
La poitrine pleine de roses.
Il brûle tout, hommes et choses,
Dans sa placide cruauté.

Il met le désir effronté
Sur les jeunes lèvres décloses ;
Il brille, le sauvage Eté,
La poitrine pleine de roses.

Roi superbe, il plane irrité
Dans des splendeurs d’apothéoses
Sur les horizons grandioses ;
Fauve dans la blanche clarté,
Il brille, le sauvage Eté.

***

Théodore de Banville, Les Cariatides, 1843
Illustration : gravure de Manet pour le frontispice des Ballades de Banville (source)

Je crois que pour saisir une partie du sens de ce poème, il faut essayer de le lire à haute voix en respectant la ponctuation  et la versification : pauses seulement après points et virgules ; pas de pause à la rime et à la césure (après la 6e syllabe pour les alexandrins) s’il n’y en a pas, mais accent d’intensité ou allongement du son vocalique ; quand une virgule est précédée d’un e muet et suivie d’une consonne, manque de chance, on ne peut pas reprendre son souffle, car on ne peut marquer la virgule et prononcer le e muet qu’en allongeant la voyelle précédente (ex : v4 Mooooon-teu-co-meu-dan…). Normalement, à la fin de ce poème, vous devriez devenir tout bleu, avec une voix de macchabée…

Mon âme vers ton front où rêve, ô calme soeur,
Un automne jonché de taches de rousseur,
Et vers le ciel errant de ton oeil angélique
Monte, comme dans un jardin mélancolique,
Fidèle, un blanc jet d’eau soupire vers l’Azur!
– Vers l’Azur attendri d’octobre pâle et pur
Qui mire aux grands bassins sa langueur infinie,
Et laisse sur l’eau morte où la fauve agonie
Des feuilles erre au vent et creuse un froid sillon,
Se traîner le soleil jaune d’un long rayon.

L’ hiver bat la vitre et le toit.
Il fait bon dans la chambre,
A part cette sale odeur d’ ambre
Et de plaisir. Mais toi,

Les roses naissent sur ta face
Quand tu ris près du feu…
Ce soir tu me diras adieu,
Ombre, que l’ ombre efface.

***

Paul-Jean Toulet, Les Contrerimes, 1921

N’y eût-il dans le désert
qu’une seule goutte d’eau qui rêve tout bas,
dans le désert n’y eût-il
qu’une graine volante qui rêve tout haut,
c’est assez
rouillure des armes, fissures des pierres, vrac des ténèbres
désert, désert, j’endure ton défi
blanc à remplir sur la carte voyageuse du pollen.

***

Aimé Césaire, Ferrements, 1960

Il y a quelque chose de mort au fond de moi,
Une vague nécrose une absence de joie
Je transporte avec moi une parcelle d’hiver,
Au milieu de Paris je vis comme au désert.

Dans la journée je sors acheter de la bière,
Dans le supermarché il y a quelques vieillards
J’évite facilement leur absence de regard
Et je n’ai guère envie de parler aux caissières.

Je n’en veux pas à ceux qui m’ont trouvé morbide,
J’ai toujours eu le don de casser les ambiances
Je n’ai à partager que de vagues souffrances
Des regrets, des échecs, une expérience du vide.

Rien n’interrompt jamais le rêve solitaire
Qui me tient lieu de vie et de destin probable,
D’après les médecins je suis le seul coupable.

C’est vrai j’ai un peu honte, et je devrais me taire ;
J’observe tristement l’écoulement des heures ;
Les saisons se succèdent dans le monde extérieur.

***

Michel HouellebecqLa Poursuite du bonheur

Ce que j’écris :

La phrase qui tue :

Peu m'importe.
Peu m'importe quoi ? Je ne sais 
pas ; peu m'importe.
                    Fernando Pessoa

Classement par auteurs

Haïku !!!

Sans savoir pourquoi
                     j'aime ce monde
   où nous venons mourir___

                 Natsume Sôseki

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